Art contemporain au Château La Coste

La « Maman Accroupie » de Louise Bourgeois

C’est elle qui nous accueille, cette Crouching Spider de Louise Bourgeois date de 2003. Parfaitement à sa place dans ce paysage verdoyant, tel Narcisse se mirant dans l’eau étale du seuil de ce domaine viticole. Cette adresse, le Puy-Sainte-Réparade, ravira les amoureux du vin, celleux (oui, tant pis pour l’Académie!) des promenades en plein air, ainsi que de l’art contemporain. Sans oublier les gastronomes: cinq restaurants dont celui d’Hélène Darroze (3 étoiles au Michelin), mais aussi La Terrasse, aux menus simples et gouteux, à dominante végétarienne. Le délicieux rosé est  issu de vignes certifiées en agriculture biodynamique par le label Demeter .

Le domaine de Château La Coste s’étend sur 200 hectares. Les architectes des pavillons d’exposition ont pour noms Jean Nouvel, Renzo Piano et Oscar Niemeyer, excusez du peu! On peut y louer l’une des 28 villas ou séjourner dans l’hôtel Spa. Luxe, calme et volupté pour genzaisés au coeur du vignoble (non  testé!).

Le plan papier

La promenade se fait plan en main. Nous allons y découvrir, outre des architectures étonnantes, des oeuvres d’art en extérieur et des galeries. Le pavillon de musique de Frank O.Gehry possède, de l’avis de notre amie chanteuse lyrique, une bonne acoustique, malgré son aspect déconstruit et assez moche si j’exprime le mien…

Il nous a fallu plus de deux heures et demie pour faire le tour de sans se presser.

L’architecte japonais Tadao Ando (1941) est à l’honneur avec entre autres le centre d’art regroupant les restaurants et le plan d’eau, structure en béton et verre munie de passerelles du plus bel effet avec des formes simples et des volumes qui laissent place à la nature. Au sein du parcours, deux Origami Benches, ainsi qu’une chapelle rénovée et un pavillon dans le même esprit épuré. Pour klui, l’architecture « doit rester silencieuse et laisser la nature parler directement au travers du soleil et du vent ». Le pavillon en épicéa abrite quatre cubes de verre évoquant la préservation de l’environnement. Pourquoi le choix de ces quatre motifs? je doute un peu de leur pertinence.

Quelques édifices, parmi les 300 à travers le monde, signés par cet architecte inspiré et inspirant ICI.

Yoko Ono, Wish Trees, 2019

En revanche, Yoko Ono parait fort judicieuse avec ses arbres à voeux interactifs sur lesquels vous pouvez accrocher le vôtre parmi d’autres sur des arbres fruitiers. Une oeuvre dont elle eut l’idée dès 1981. « All My Works Are A Form Of Wishing« . Tous les vœux sont retournés à Yoko Ono et sont déposés dans son IMAGINE PEACE TOWER.

Jenny Holzer, Truisms Benches, 2017

Un truisme est une vérité banale, évidente, qui ne mériterait même pas d’être énoncée. Ceux qu’énoncent Jenny Holzer, sont des basiques et on s’assoit dessus. Des phrases simples, prosaïques, politiques ou philosophiques, dont certaines engagent tout de même à la réflexion.

Tracey Emin, Self-Portrait, 2013

Pour découvrir l’autoportrait de l’artiste Tracey Emin, il faut prendre de la hauteur sans se laisser impressionner. Est-ce démesuré d’élever ainsi sa personnalité? Au bout, un simple tonneau, une vieille barrique, percée d’un trou. Est-ce trop de modestie? Penche-toi et scrute. Lorsque tes yeux se seront habitués à la pénombre, tu apercevras une humble, mignonne et chétive céramique intérieure. Une allégorie saisissante.

Sophie Calle, Dead End, 2018

Tout à fait cohérente à son oeuvre, Sophie Calle expose une installation en forme de sépulture interactive. Muette comme une tombe, elle conserveras soigneusement tous les secrets que vous voudrez bien lui confier sous forme de billet-confession à insérer dans la fente. Entre intime et  public, rapprochant l’art de la vie, elle raconte ou suggère les histoires de la vie, de l’amour et de la mort.

Bob Dylan, Rail Car

Ce wagon ouvert à tous vents qui soufflera-t-il la réponse? Sept tonnes de fer sur des voies ferrées. Bob Dylan parle de « fer recontextualisé pour représenter la paix, la sérénité et le calme ». Le minerai de fer fait partie de son enfance, tout comme le trafic ferroviaire et ce n’est pas sa première sculpture forgée dans ce métal.

Michael Stipe, Foxes, 2008

Un peu de sculpture concrète avec ces renards stylisés prenant d’assaut cette colline boisée. C’est à Michael Stipe, musicien chanteur du groupe R.E.M. (dissout en 2011) et artiste visuel, que l’on doit ce détour. L’acronyme R.E.M., signifiant Rapid Eye Movement, évoque le sommeil paradoxal, ce qui s’accorde parfaitement à notre aveuglement face au traitements infâmes infligés aux animaux. Au coeur de ces oeuvres conceptuelles, ces quelques renards inaltérables sont un rappel de la vie sauvage.

Andy Goldsworthy, land artiste très présent en Provence, offre ici une expérience troublante. Oak Room est une chambre ensevelie dont la structure est bien en chêne. L’entrée se trouve insérée dans un ancien mur de retenue en pierres sèches, les parois en dôme sont tressées de branches de chêne et forment une chambre circulaire impressionnante.

Sean Scully, Wall of Light Cubed, 2007

Parti de la peinture géométrique minimaliste, Sean Scully (1945) déploie ici 1000 tonnes de pierre calcaire de trois teintes gravées de lignes. Cette sculpture monumentale fait écho à Boxes Full of Air, autre installation de cet artiste placée plus loin, une oeuvre beaucoup plus aérée, mais de même dimension.

Frank Gehry et Tony Berlant, The Marriage of Athens and New York, 2019

Entre temple antique grecs et gratte-ciels citadins, ce sont trois structures en inox et fibre de verre qui trouvent un certain attrait par leur incongruité et leur transparence reflétant la nature alentour. C’est tout. Architecture ou sculpture, c’est monumental et bof.

Prune Nourry, Mater Earth, 2023

Dommage, ma photo est nulle. Mais l’oeuvre est très belle. Cette oeuvre de Prune Nourry est née (!) de la modèle enceinte qu’elle avait choisie pour la photographier dans une piscine de lait. Elle est réalisée en terre crue et en cendre des feux de forêt de 2022. Allez, j’en pique une bien plus belle:

Photo Stéphane Aboudaram

J’arrête là mon aperçu en mentionnant que la promenade est superbe et que d’autres oeuvres vous surprendront si vous faites escale près d’Aix-en-Provence. Parmi les artistes, un chemin pavé de pierres du port de Marseille d’Ai Weiwei, une sobre installation de Lee Ufan, une goutte en acier de 4m de diamètre de Tom Shannon, des murs de Richard Serra, des perles d’Othoniel, deux superbes ponts en pierre de Larry Neufeld, etc. Il y a aussi des choses très laides à mon goût, comme cette sculpture jaune vif intitulée avec humour Faux-Pas de Frank West.

12 octobre, l’été s’étire…au Château La Coste

5 réflexions sur “Art contemporain au Château La Coste

  1. Voilà une bien jolie promenade. J’avais entendu parler de ce lieu par un ami, j’ignorais que les œuvres y restaient à demeure. J’aime bien l’idée de l’arbre à vœux. Il me semble avoir lu que des sculptures d’Anselm Kiefer ont été ajoutées cet été (j’espère pouvoir aller voir son expo au LAM de Villeneuve d’Asq, la semaine prochaine si tout va bien).

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    1. Hélas rien de Kiefer. Va voir le film de Wenders, en 3D, il permet une certaine approche. C’est poétique et biographique à la fois. J’aimerais tellement pouvoir aller à la Ribaute à Barjac, mais il s’inscrire très à l’avance. Quelques aperçus dans le film. Je me réjouis de te lire sur son expo (trop loin de chez moi 😟)

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      1. Hélas, aucun cinéma ne passe ce film là où j’habite. J’espère qu’il sortira en dvd. J’ai déjà un dvd passionnant dans lequel on voit bien le site de Barjac qu’il occupait encore. Ça m’avait déjà bien fait rêver. Le film : over your cities grass will grow.
        En effet, je m’étais renseignée pour la visite, cette histoire de réservation à l’avance n’est pas pour moi. Déjà aller voir les expos chaque fois que je le peux.

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