A l’Arsenic, Centre d’Art Scénique Contemporain. Lausanne, du 21 au 25 février 2024

La performance de l’artiste Renée van Trier laisse un goût étrange et c’est en y repensant qu’on en découvre la richesse.

Un double écran occupant tout l’espace d’un angle de la salle; la projection sur le côté opposé d’un film continu, montrant l’artiste dansant dans son costume rose; trois flaques de jouets en plastique déglingués sur le sol. Le public librement installé contre les parois.

Vêtue de rose, coiffée impeccablement d’une longue queue de cheval lustrée et scintillante, elle marche donnant la main à une enfant  habillée à l’identique. Une marionnette, en fait. « Je veux le meilleur pour mon enfant » chante-t-elle. A l’écran, des visages de dessins animés ouvrent leurs yeux démesurés, bientôt se déformant, se délitant, puis remplacées par les figures de clowns ambigus, légèrement terrifiantes.

L’artiste nous emmène dans un monde semi virtuel, ce monde de consommateur.ices dans lequel baignent nos enfants, celui-là même que nous, adultes, leur offrons. Il est à l’image du nôtre, conforme à nos idéaux stéréotypés par les diktats, les médias, les réseaux sociaux. Il est joliment rose ou bleu pâle, animé et sans aspérité, glissant comme un toboggan, attendrissant comme un bébé dauphin, si parfait, si enviable. Cette utopie que l’on offre à nos enfant, a-t-on oublié qu’en réalité elle n’existe pas? Qu’à la longue, elle nous met à genou, ne produisant qu’humiliations et déceptions?

S’endormir devant un ciel étoilé, bercé par une lancinante et douce mélodie, aux côtés de cette créature moelleuse entre le delphineau et le chiot, quoi de plus confortable pour dissoudre la cruauté d’une réalité universelle?

La performance vocale de Renée van Trier est assez extraordinaire, aussi irritante que curieuse. Et le travail sur la vidéo, intelligence artificielle ou pas, est tout aussi fascinant. Quant au thème, il est malaisant, donc traité comme tel… et véritablement essentiel.