Comédie de Genève, du 22 au 26 mai 2024
Avec David Geselson, Peter de Graef, Adeline Guillot, Marina Keltchewsky, Laure Mathis, Elios Noël
Un petit morceau de pierre nous est remis avant le spectacle par David Geselson lui-même.
Cette pièce de David Geselson propose d’interroger les preuves scientifiques de nos origines humaines, tout en mêlant l’intime à l’universel. Elle examine les pulsions des êtres, la complexité de leurs choix en matière de compagnonnage et ce qui en résulte. Ponctuée d’extraits vidéo relatant certaines étapes du processus de paix entre les Etats d’Israël et de Palestine, le récit installe également un regard politique sur l’historique de ce conflit.
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La représentation débute par une rencontre dans le noir entre deux personnes, dont il s’avère qu’iels sont scientifiques généticien.ne.s et participent à un symposium (San Francisco 1986). Après un baisser de rideau, une parenthèse s’ouvre sur une adresse au public, un moment de transmission de connaissances : David Geselson et Laure Mathis donnent un aperçu de notions biologiques, une introduction à l’univers de la génétique. L’objectif de ces équipes scientifiques est d’investiguer sur le gène humain, chercher de quoi il se compose. Y a-t-il eu contact entre Neandertal et Sapiens? le lieu de vie a-t-il une influence sur le génome?
Puis le spectacle se poursuit, une « cabine blanche » est montée à vue, un lieu de travail aseptisé où les chercheur.euse.s en combinaisons étanches font leurs expérimentations. Car en génétique, la moindre particule d’ADN contamine l’objet étudié et fausse le résultat obtenu. Une véritable enquête est mise en place qui amènera les scientifiques à se déplacer à Zagreb, pour récolter une collection d’os néandertaliens. L’occasion d’une incursion vers les atrocités commises en ex-yougoslavie dans les 90, qui font l’objet de recherches génétiques.
Cette cabine (mobile) sera aussi l’endroit où dessine Marine Dillard, de très belles créations en direct à l’aérographe retro-projetées sur la vitre. Un violoncelliste (Jérémie Arcache) accompagne en direct la production. Un autre espace laisse place aux projections vidéos.
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Pendant la progression des travaux, que l’on suit sur plusieurs années, les relations entre les scientifiques évoluent aussi. L’une se retrouve enceinte, mais de qui? Un autre rencontre son père qui l’a abandonné. Une relation de couple lesbien se construit. L’Alzheimer d’une troisième se déclare et elle prépare sa fille à ses conséquences. Autant de thème interrogeant la filiation, la transmission et l’attraction mutuelle.
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Cela fait beaucoup d’évènements à traiter et la pièce s’enlise un peu vers la fin. Mais la durée des prospections justifie un temps long et l’étude finit par montrer que Sapiens et Neandertal se sont réellement croisés, créant des êtres hybrides, liés par le génome, avant la disparition complète de Neandertal. On ne sait pas si l’Homo sapiens contribua directement ou indirectement à l’extinction des Néandertaliens. Au vu des conflits actuels, la question devient philosophique. Pourtant, il y a 42000 ans sur le territoire israélo-Palestinien, deux peuplades humaines se sont mêlées…
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Au final ce récit, inspiré du livre du scientifique Svante Pääbo (Nobel 2022), Néandertal : à la recherche des génomes perdus, reliant le présent et le passé, passant par l’intime et l’universel, dépeint l’histoire passionnante de la variété de notre humanité ainsi que celle de l’Humanité. Même si, à mon avis, la pièce mériterait d’être resserrée à certains endroits, son sujet accolant l’histoire et la science, sa forme originale et les performances des comédien.ne.s, toustes excellent.e.s, en font une pièce marquante, tout autant que pertinente.