
Athéna est la déesse antique de la sagesse, de la stratégie militaire, des artistes, des artisans et des enseignants. Pour Socrate, elle serait la personnification de l’intelligence parmi les dieux. La cité qui porte son nom a donné naissance à la démocratie.

Une gladiatrice? Une super héroïne? L’avatar de Virginie Despentes? La nouvelle Athéna? Assise au fond de la scène, elle observe, impassible, l’arrivée du public. A son côté, un bouquet de lances.
Ce n’est pas une déesse. Elle n’a pas de pouvoir magique. Elle est humaine malgré son apparence. Elle va devoir donner de sa personne. Un soupçon de Sisyphe, un peu de Fifi Brindacier, mais aussi de la stratégie, de l’art et de l’artisanat.
Son travail, aussi dérisoire qu’il parait, elle veut le mener à bien. Elle est déterminée. Seule sur son acropole, elle va mener un combat avec la matière et la gravité. Sans un mot, avec application, elle va construire.
Est-ce le tonnerre qui gronde? Des chocs ponctuent ses pas et chaque effort produit un grondement menaçant. La colère de Zeus? L’écho d’une lutte titanesque?

Ses moyens sont limités: du carton et du scotch. Et pourtant elle s’obstine. Nous souhaitons tous avoir un toit, un refuge. Elle ne ménage pas ses forces. S’aidant de ses lances, elle soutient l’édifice en cours, bancal, fragile. Il manque de s’effondrer! Le public retient son souffle, comme si celui-ci était assez puissant pour détruire l’assemblage. Craint-il de devenir le loup du conte? Un vrai suspens s’installe dans la salle. Des rires aussi… pour conjurer le mauvais sort? On sourit avec elle. De soulagement.
Le bâtiment a beau se rebiffer, les murs se décoller, l’équilibre résister… c’est une guerrière. Contre toute attente, elle parvient à édifier son refuge.
C’est alors que le son de la tronçonneuse se déchaîne…

Pas envie de dévoiler la fin ébouriffante et spectaculaire de ce conte. Il faut voir la pièce pour se faire une idée. C’est un éloge de la patience, celle de l’artiste et un peu celle du public. De la ténacité aussi. C’est également un symbole politique fort. Mais cela, il faudra assister au spectacle pour le découvrir. Nous avons la chance de pouvoir critiquer notre démocratie. Prenons garde à son effondrement… Le souffle du populisme est redoutable.
Au Théâtre de Vidy, Lausanne, jusqu’au 5 mars 2023.
En 2017, création des Contes Immoraux – Partie 1 : Maison Mère pour la documenta 14 de Kassel. Cet opus sera suivi de deux autres contes.