« Sonne, los jetzt! » (Soleil c’est parti!) Nicolas Stemann

Avec Alicia Aumüller, Daniel Lommatzsch, Karin Pfammatter, Sebastian Rudolph, Lena Schwarz, Patrycia Ziólkowska

Dans le cadre du week-end d’échange entre le théâtre de Vidy et le Schauspielhaus de Zurich, le plaisir d’assister à une deuxième production zurichoise après Moby Dick. Du 24 au 26 février 2023, un texte puissant d’Elfriede Jelinek donne voix à un soleil aussi féroce qu’impitoyable.

Dans l’obscurité qui vient de se faire dans la salle de spectacle, une voix s’élève. C’est un poème en anglais de T.S. Elliot (ci-dessous traduit). La chaleur de cette voix, sa profondeur, sa tristesse, emportent immédiatement. Même sans tout comprendre, on perçoit qu’il s’agit d’une écrasante vérité humaine dont elle nous parle.

Un grand disque se déploie doucement au-dessus de la scène. La parole est donnée au soleil. Un soleil cruel et égocentré, qui connait sa puissance. « Les humains m’aiment et me craignent. Ils savent que quelque chose de terrible va arriver« . Les mots d’Elfriede Jelinek, l’autrice autrichienne, connue pour son écriture caustique, tentent de sonner le glas de l’aveuglement de l’humanité. Sous forme de comédie, entendrons-nous ses menaces?

© Philip Frowein

La pièce a été créée à Zurich par le codirecteur du Schauspielhaus, Nicolas Stemann. Elle est donc jouée en allemand surtitré français. Quelque peu laborieux pour nous de saisir au vol l’entièreté des abondants propos de la pièce. Des chants choraux sont interprétés avec brio, accompagnés par deux musiciens jouant en direct. L’humour des digressions des acteur.ices contrebalance la sévérité de ce texte grave sur le réchauffement climatique, dénonçant la culpabilité des humains, sourds aux avertissements des écologistes et aux manifestations d’une jeunesse horrifiée.

Photo:Philip Frowein

Le disque solaire, dont la peau sera peu à peu déchiquetée, est matériellement présent et central, les comédien.nes lui prêtant tour à tour leur visage. Son monologue intransigeant est contrebalancé par une scénographie délirante pleine d’idées farfelues et drôles: la fille en bikini qui shoote dans la terre gonflable puis se transforme en glacier fondant surmonté du drapeau suisse; les sprays et jets d’eau sensés refroidir une température insoutenable et dont sa majesté le soleil s’amuse, implacable; le groupe rock et ses guitares électriques déchirant le morceau « Highway to Hell »; Le public qui doit chanter pour comprendre: « Es ist zu spät ».

Tout d’abord anonymes et masqués, costumés de noir, les personnages endossent des robes d’une rutilance solaire, des combinaisons de protection à la chaleur, passent de l’arbre à l’animal ou à de baroques Marie-Antoinettes emperruquées. Les comédien.nes, qui doivent être un peu déstabilisés par le manque de répondant d’un public francophone (romand de surcroît!), ne perdent pas leur dynamisme pour autant et sont formidablement intenses.

Au final, un spectacle un peu long et loquace au vu de sa langue originale, mais bourré de fantaisie et dont le thème incontournable contribue à éveiller nos consciences assoupies.

 

 

 

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