« Fantasmagoria » Philippe Quesne

Oubliée dans mes brouillons, voici une chronique qui date de mai 2022… au Théâtre de Vidy.

Un voyage dans un environnement inconnu et angoissant, voilà l’ambiance à laquelle nous convie cette fois-ci, le metteur en scène et plasticien Philippe Quesne. Ses pièces montrent habituellement des communautés en recherche de fonctionnements inédits, cette confrérie-là est celle des esprits.

Philippe Quesne s’inspire ici des mémoires d’un certain Étienne-Gaspard Robert, dit Robertson, pour vagabonder dans une quatrième dimension esthétisante teintée de macabre. Ce physicien-aéronaute organisait, fin XVIIIe, des séances de fantasmagorie qui firent grand bruit parmi la société française bousculée par ses mutations. Sa proposition? Jouer à se faire peur. En alliant les progrès techniques et l’intérêt pour le surnaturel, il projetait des images évoquant spectres, esprits et fantômes, faisant naître l’intérêt pour le surnaturel. Rimbaud, Maupassant, Poe, Wilde… les écrivains explorent l’esprit, tout comme Freud l’inconscient. Caspar David Friedrich figure la nature sauvage et l’expressionnisme de Munch ou de Klimt fait jaillir la subjectivité et les émotions.

© Martin Argyroglo

Entraîné par l’oeil dans une ronde d’objets non identifiés qui finiront par s’assembler en squelettes, l’ouïe sollicitée par une musicalité d’outre-tombe épicée par des murmures et des grincements, le public est promptement embarqué au fil de cette ambiance ténébreuse.

Le fond de scène s’ouvre ensuite sur une magnifique assemblée d’une quinzaine de pianos anciens qui ne tardent pas à exprimer leurs individualités par le son, mais aussi par l’action. L’eau, le feu et la fumée se mêlent à la marche inexorable des silhouettes squelettiques figurant une danse macabre non dénuée de beauté tragique… ou comique, selon le degré de votre attention.

© Martin Argyroglo – Fantasmagoria – Philippe Quesne

Le système de projection est bluffant et parfaitement orchestré. Les pianos deviennent des incarnations fantomatiques tentant une communication insolite. On peut se laisser emporter dans la sarabande ou rester de marbre, la poésie de ce théâtre sans comédiens est indéniable.

Philippe Quesne orchestre un cabaret théâtral sans acteurs pour pianos esseulés et rondes macabres, mis en musique par Pierre Desprats. Une attraction théâtrale composée d’apparitions volatiles et lanternes magiques, un monde-atelier accueillant toutes les projections.

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