« Voyages en art suisse » Christine Salvadé

Art suisse??? Vous avez bien dit art suisse? Comment l’art pourrait-il être nationalisé? Y aurait-il des points communs entre des pratiques contemporaines aussi diverses?

Franchement, je ne sais pas quel artiste aimerait être placé dans une case « art suisse ». Sam Keller, directeur de la fondation Beyeler.

Christine Salvadé, malgré un travail absorbant en tant que responsable de l’Office de la culture du canton du Jura, a sillonné le pays à la recherche d’indices évoquant l’existence d’un art suisse. Mandatée par Heidi.news, elle a rencontré des artistes, visité des lieux d’exposition, interrogé des curat.eur.rice.s et des galeristes, pris la température des écoles d’art. Elle en a ramené la conviction que l’art en Suisse possède une qualité et une vitalité exceptionnelles pour un si petit pays. En définitive, c’est l’écosystème des différents act.eur.ice.s du milieu en Suisse ou de Suisse que nous découvrons dans ce livre qui ébauche un portrait de l’art contemporain en Suisse.

Menée durant le confinement, cette exploration interne et inachevée des pratiques artistiques du pays ne mentionne pas la dimension internationale de l’activité artistique suisse. L’autrice dit n’en livrer qu’une image impressionniste et subjective. Elle n’en est pas moins passionnante.

En Engadine « la Tuor per Susch » de Not Vital qui signale le Muzeum Susch de Grazyna Kulczyk. Photo: Kostas Maros pour Heidi.news

Plus que dans les institutions, c’est dans les lieux alternatifs que l’art actuel prend son essor. Les offspaces fleurissent dans les grandes villes avec, pour exemple dans le livre, le dynamique Kreis 4, l’ancien quartier chaud de Zürich (répertoire ICI).

L’art est devenu un atout pour la ville de Bâle. Avec la Fondation Beyeler et surtout Art Basel, la célèbre manifestation d’art contemporain. Toutes les formes d’art y sont représentées: peinture, sculpture, installation, vidéo, multiples, impression, photographie et performance. Elle s’étend maintenant à Miami et à Hong Kong  

L‘Engadine recèle des trésors dans ses galeries et, selon certains professionnels,  deviendra sous peu une référence mondiale. Déjà des parcours guidés en bus sont proposés pour en visiter les nombreux lieux d’exposition.

Chef-lieu du canton d’Argovie, Aarau détient le musée qui abrite la plus importante collection publique d’art suisse. Christine Salvadé nous explique pourquoi.

Genève a beau être en retard, son salon Artgenève, créé en 2012, a creusé sa place en Europe, exposant de grandes galeries de Milan ou Londres, mais conservant nombres d’exposants suisses.

Des entretiens avec quelques pointures suisses de l’art contemporain émaillent cet ouvrage:

Ainsi, Franz Gertsch, « (…)un artiste qui figure déjà dans les livres d’histoire ».

Franz Gertsch , Rüschegg
August 2021. Fotos Kostas Maros
Atelier Franz Gertsch

Claudia Comte, « Si je ponce ces sculptures d’une manière si méticuleuse, c’est pour montrer la beauté qui est à l’intérieur de ces arbres ».

Performance de Claudia Comte, Artbasel:

 

Augustin Rebetez, « Je serais assez comme Ben, à dire que la Suisse n’existe pas, mais elle existe justement parce qu’elle n’existe pas ».

Augustin Rebetez sur Plateforme 10

Valentin Carron, « En fait, je suis complètement antinationaliste ».

Valentin Carron au barrage de Mauvoisin

Michel Grillet, « Le Pic Chaussy (…), c’est mon Fujiyama à moi ».

Michel Grillet, Mémoire de paysage, 2005-2007

Miriam Cahn, « J’ai toujours aimé être un peu étrangère ».

Miriam Cahn

ou encore l’exposante au pavillon suisse de la Biennale de Venise 2022, Latifa Echakhch, « Le but n’est pas le pavillon, mais ce qui va vous en rester après la visite ».

Déjà en 2013, lauréate du prix Marcel Duchamp, elle travaillait sur la mémoire et le souvenir.

Voyages en art suisse nous apprend, entre autre, que l’art suisse, y compris contemporain, est collectionné par la banque Pictet; que le Kunsthaus d’Aarau expose l’art suisse pour la quatrième fois; que les «Modernités suisses» ont été célébrées au Musée d’Orsay; qu’en 12 ans, le nombre de candidatures a été multiplié par trois à la HEAD de Genève (Haute Ecole d’Art et de Design); que l’ECAL (Haute Ecole d’Art de Lausanne) a vu le nombre de ses candidatures doublé en trois ans (130) pour 17 admissions seulement par année; que Michel Grillet et Franz Gertsch ont « percés » à plus de quarante ans; qu’une milliardaire polonaise, Grazyna Kulczyk, a ouvert une galerie prestigieuse dans un village des Grisons de 200 habitants;

Si tu veux faire de l’art, il faut être courageux et persévérant. Miriam Cahn

Le dernier chapitre de ce voyage inachevé est intitulé « A tous les inexplorés… et à une nouvelle génération libérée« . Il formule la volonté actuelle d’éclatement de toutes les frontières, non seulement géographiques, mais aussi de genre, de hiérarchie, de pratiques artistiques.

« En Suisse, il y a davantage de tout: davantage de commandes publiques, davantage d’argent, de collectionneurs, d’institutions, de prix, de bourses, de lieux de résidence,  de fonds cantonaux et municipaux… Rencontrer un galeriste ou un commissaire d’exposition, c’est possible pour un artiste à l’écart du milieu. En France, ça n’est même pas imaginable. Ce confort peut se ressentir dans la création. » Frédéric Elkaïm (Plateforme Art Now!)

Latifa Echakhch, « L’Air du temps » , vue de la face A.
Latifa Echakhch, « L’Air du temps », 2012, vue de la face B.

5 réflexions sur “« Voyages en art suisse » Christine Salvadé

  1. Pour paraphraser Latifa, le but n’est pas l’article mais ce qu’il en reste et il en reste toujours beaucoup qui m’accompagne des jours. Merci beaucoup pour tous ces partages, chère Culturieuse 🙂

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