Escapade ferroviaire suisse en art (3-Aarau)

Pourquoi Aarau? Son musée (Aargauer Kunsthaus), d’après le livre de Christine Salvadé, accueille la plus importante collection d’art suisse. Non que nous parlions ici d’art nationaliste, mais bien d’oeuvres d’artistes suisses. Peut-être parce qu’elles sont moins chers à l’achat, ce petit musée (enfin pas si petit tout de même), au vu d’autres grandes structures comme à Zurich, Genève ou Bâle, a fait le choix d’acheter de l’art indigène contemporain depuis 1860. L’exposition du moment s’intitule Une femme est une femme est une femme

L’agrandissement du musée est signé Herzog et de Meuron
Photographies de Katrin Freisager

Immédiatement, deux oeuvres qui donnent à voir l’écart du temps artsitique:

Vraiment navrée pour les reflets sur les tableaux…

Et un coup de coeur pour la peinture de Leiko Ikemura (1951). J’avais vu sa sculpture Figure Jaune à Trois Bras au MCBA sans impression particulière pourtant. Née au Japon, cette artiste émigre en Europe en 1972. Son art parle d’émotion, de spiritualité. Actuellement, elle vit et travaille la sculpture, la peinture, la photographie et le dessin à Cologne. Le tableau ci-dessous est sans titre, cependant je trouve qu’il représente parfaitement le sentiment de l’emprise et de cette nébuleuse qui l’entoure et empêche tout mouvement de révolte. La petite silhouette rattachée au corps retenu évoque l’implacabilité de l’ascendance.

Leiko Ikemura, sans titre, 1980 (dispersion sur papier, 149×213 cm)

Ce lit défait de Meret Oppenheim éclaire à lui seul une salle entière. Le thème du lit, de la stricte intimité, a été repris de nombreuses fois par les artistes femmes. Lieu du repos, de l’activité sexuelle ou du rêve, de la naissance et de la mort. On peut penser à celui de Tracey Emin, une installation (1998)ou encore au travail photographique de Sophie Calle sur les Dormeurs (1979). Cette peinture lumineuse évoque tout cela avec simplicité et virtuosité.

Meret Oppenheim, le lit défait (das aufgeschlagene Bett), 1939

Inna Barfuss (1949) raconte une histoire avec ce triptyque au crayons de couleur, une histoire de lit encore une fois, une histoire qui finit mal dirait-on.

Inna barfuss, sans titre, 1979

Doris Stauffer (1934-2017) met en scène Blanche-Neige et les huit petits enfants. Allongée sur un matelas moelleux, cette princesse de conte de fée est plutôt rigide et les petits enfants ressemblent à des seins allaitants. Où est le prince charmant?

Doris Stauffer, Schneewittchen und die acht Geisslein, 1966

Dorothy Iannone (1933) fut la compagne de Dieter Roth dès 1967. C’est ce dernier qui est alors devenu sa muse et non le contraire. Dorothy la Lionne, s’est battue contre la censure. En 1961, elle poursuit le gouvernement américain contre la censure du livre Tropique du Cancer de Henry Miller. Elle défend l’amour libre et la sexualité féminine autonome.

Dorothy Iannone, A Cookbook (Portfolio), 1998

Son art se situe hors des sentiers battus même si elle fut proche des artistes du mouvement Fluxus. Son style pourrait faire penser à l’art brut (Aloyse), mais elle n’en a pas les critères. Elle ne s’inscrit pas dans le mouvement féministe, même si elle prône une sexualité sans tabou, d’ailleurs liée à la spiritualité. Elle dessine et peint sa vie intime et privée de façon réaliste, avec une indépendance totale. (Plus sur l’artiste ICI)

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Autre enthousiasme pour le travail d’Olivia Etter (1956). Un univers d’insectes fantaisistes et délicats et des sculptures d’une élégance brancusienne!

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Klaudia Schifferle (1955), collages, spray, peinture, sculpture, céramique…ce sont ces deux petits travaux sur papier qui m’ont plu.

Sans titres, graphite et pastel sur papier, 1994 et 1995

La genevoise Mai-Thu Perret (1976) part d’une formation littéraire et s’épanouit dans la création artistique conceptuelle. Elle a inventé une communauté de femmes imaginaire en recherche d’une société sans patriarcat et créé des objets en lien avec celle-ci. Elle partage un atelier avec John Armleder.

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Une quarantaine d’artistes sont représentées dans cette exposition par une ou plusieurs oeuvres: Heidi Bucher (vue à Susch), ainsi qu’Alice Bailly, Louise Bourgeois (incontournable dans chaque expo à thème féminin..), Miriam Cahn, Silvia Gertsch (fille de Franz du prochain épisode), etc. Je ne sais pourtant pas si « Une femme est une femme est une femme » est un titre véritablement adéquat, il me parait un peu trop essentialiste et restrictif. Mais les oeuvres sont intéressantes et éloquentes, qu’elles soient dans la mouvance féministe ou non.

Passons à l’étage pour un aperçu de la collection permanente de ce musée :

Oula, voici un artiste masculin…

Hans Schärer, Madonna, 1973

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Focus sur quelques oeuvres:

Une impressionnante série sur les suicides de célèbres artistes de Valérie Favre (1959):

Hugo Suter (1943-2013), vu à Coire, toujours impressionnant dans sa pratique sous-verre:

Malerei (Wolke), 2003

 

Deux imprimés de Tatjana Erpen (1980) aux côtés du coquillage de Christian Gonzenbach (1975) dont il faut voir l’autre face pour réaliser que l’on se trouve  devant la Cène Ultime.

Amitlu Anec, 2012

Un quatrième et dernier épisode à Zurich et près de Berne terminera cette escapade avec les expositions de deux monstres sacrés…

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