Mitten wir im Leben sind/Bach6Cellosuiten Anne Teresa de Keersmaeker & Jean-Guihen Queyras

Mitten wir im Leben sind / Bach6Cellosuiten – Spectacle de danse de Anne Teresa De Keersmaeker & Jean-Guihen Queyras / Rosas – à la Comédie de Genève du 5 au 7.09.2023

Photos: © Anne Van Aerschot, sauf scène vide, scotchs, saluts.

Rien ne pourra distraire l’attention que porte le public à la musique et aux danseu.r.se.s. La scène est vide. Avant le spectacle, on discerne néanmoins des formes dessinées sur le plateau nu: la géométrie est un élément fondamental pour la chorégraphe. L’audition et la vue se mêleront alors pour déclencher l’émotion.

Entre chaque pièce, Anne Teresa et l’un.e des interprètes placent des bandes de scotch colorés au sol, formant des figures géométriques (triangle, carré, rond rectangle…). Cela fait, la chorégraphe se place à l’extrême bord de la scène, face au public, et titre en gestes le numéro et la forme du morceau.

Ce sont donc six suites jouées en direct par le violoncelliste. A chaque morceau, il placé à différents endroits, quelquefois même dos au public.

Les danseurs sont simplement vêtus de shorts amples et de T-shirts, la danseuse d’un pantalon et un haut noir transparent, La chorégraphe, elle porte une robe fendue dos nu noire, puis bleue. Iels sont tous chaussés de tennis multicolores.

Les trois danseurs (Bostjan Antoncic, Julien Monty, Michaël Pomero) et la danseuse (Marie Goudot) dansent seul.e.s chacun des quatre premiers morceaux, rejoints au milieu par Anne Teresa de Keersmaeker. La pièce a été créée en 2017, la chorégraphe danseuse avait alors 57 ans. Six ans plus tard, elle danse toujours le milieu de la vie  avec une intensité irrésistible.

Les deux derniers opus sont dansés en commun. La chorégraphie est très physique: des courses, des marches, des sauts, des traversées de plateau, des cabrioles sur les mains, quelques roulades. Peu de contacts entre participant.e.s, plutôt des enveloppements, de délicats toucher de doigts et les deux femmes main dans la main. Quelques moments dansés en silence, un instant sans danse, juste la musique. Et une séquence poétique dans la pénombre, où le visage et les mains d’Anne Teresa se devinent plus qu’on ne la voit sauf lorsqu’elle entre dans la lumière.

Il manque un danseur sur cette image des saluts…désolée.

La première représentation à laquelle j’avais assisté en 2015 m’avait scotchée, emballée, hypnotisée. Son solo en 2021 sur les variations Goldberg perpétua la magie de son discours corporel. En Atendant, spectacle vu à Avignon 2023, ajouta un lieu séculaire à l’émerveillement face à la performance. Ces deux heures de représentation confirment mon admiration, il n’y a qu’ainsi qu’il m’est possible d’être pleinement au centre de la musique. Et ce n’est pas uniquement la vue qui me le permet, c’est comme si je vivais les postures et les mouvements de l’art d’Anne Teresa de Keersmaeker, comme en miroir interne. Il y a ces mouvements basiques, ces répétitions, ces regards, ces respirations altérées, les crissements des chaussures, un tout qui fait que l’on traverse durant ses spectacles des portions d’humanité transcendantales.

« Je me réfère ici à l’un de mes principes de prédilection, my walking is my dancing, (comme je marche, je danse) où les rythmes propres du corps – les rythmes automatiques comme les battements du cœur, les rythmes semi-mécaniques et plus finement modulés comme la respiration, et enfin le rythme maîtrisé de la marche – sont à la base de la structuration et de la musicalité du mouvement dans le temps et l’espace. » (De Keersmaeker, 2013)

Pour les inconditionnel.le.s comme moi, trois dossiers sur la géométrie dans les chorégraphies de Anne Teresa de Keersmaeker.

Une spécialiste en parle dans cet audio (Anne Gillot)

 

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