Un réveillon d’expositions à Paris (I): Christian Marclay, Garouste

Quelques jours à Paris où l’on entremêle les dîners familiaux, amicaux et les évènements culturels. Quelle bonheur et quelle chance!

Un film au cinéma le soir de notre arrivée: Banshee d’Inisherin, un film de Martin McDonagh, qui se déroule sur une île irlandaise.

Au début du XXe siècle, deux compères de toujours, Padraic et Colm, se retrouvent dans une impasse lorsque Colm décide du jour au lendemain de mettre fin à leur amitié. Abasourdi, Padraic n’accepte pas la situation et tente par tous les moyens de recoller les morceaux, avec le soutien de sa sœur Siobhan et de Dominic, un jeune insulaire un peu dérangé.

Très étrange et dérangeant, ce film pousse la relation de deux amis de toujours aux confins de l’absurde. Quel sens donner à cette fable? peut-être une image du conflit irlandais fratricide? une réflexion sur la mort irrémédiable qu’elle soit choisie, évitée, attendue ou même donnée? une recherche sur la condition humaine et sa vanité vs son empathie? Ou encore l’ennui inhérent à une minuscule communauté? On en sort un peu choqué et déconcerté autant qu’émerveillé par le jeu des acteur.ice.s, la beauté des images et la merveilleuse façon de filmer cette tragique histoire empreinte aussi d’un certain humour.

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Au Centre Pompidou, trois expositions nous ont tenté. La meilleure pour le début (ce n’est que mon avis) est celle de Christian Marclay, américano-suisse né en 1955, un artiste multimédia qui nourrit son art de l’univers des sons depuis plus de 40 ans. A voir (absolument!) jusqu’au 27 février 2023.

La vue est le sens dominant. C’est sur lui qu’on se repose le plus. C’est pour ça que je m’intéresse au travail sur le son, pour bouleverser nos habitudes et essayer de nous rendre conscients de ce que nous entendons. Christian Marclay

Un premier travail sur les disques vinyle et leurs pochettes fascine par son exploration incessante des possibilités de reconstruction et de de détournement

Des partitions graphiques, en forme d’instructions d’usage, offrent des suggestions d’interprétations où l’artiste n’impose rien, mais propose. Auditeurs, compositeur et musiciens sont donc à égalité devant cette production éphémère de sonorités.

Des objets, sortes de readymade assistés ou rectifiés, toujours en lien avec le son, sont créés à partir d’objets communs.

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Ses couvertures de disques nous font regretter le bon temps des 33 tours dont les pochettes étaient si créatives et reconnaissables.

Pochettes de disques en peinture: Abstract Music.

Et puis il y a ses installations vidéo! The Clock (non diffusée dans cette expo) a fait les belles heures de ceux qui ont eu la chance d’y assister. Cette exposition montre  Telephones et Doors (Réalisé spécialement), des montages jubilatoires d’images extraites de l’histoire du cinéma. Subtitled (2017) est une installation vidéo muette en superposition. Video Quartett (2002) présente quatre montages de films où le son et l’image sont traités ensemble et de la même manière. Cela donne une composition musicale d’images sonore totalement fascinante.

Subtitled (2019), courtesy the artist and White Cube

Christian Marclay joue aussi avec les onomatopées. Pour sa série Actions, fonds peints et sérigraphies collées, il imite, avec son geste de peintre, le mot décrivant le son produit(splsh, swoosh, slurp…). Des grands formats qui rappelle l’expressionnisme abstrait (dripping, pouring) et le po art. Ailleurs, il découpe, colle et arrange une longue bande d’onomatopées de bande dessinée.

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En collaboration avec Snapchat, il crée All Together (2018), 10 smartphones diffusant plus de 400 snaps postés publiquement et produisant une oeuvre musicale originale.

Bon, je m’arrête ici avec ses cyanotypes merveilleux constitués de cassettes audios déroulées. L’oeuvre de Christian Marclay, je l’avais déjà rencontrée, mais cette exposition est mon coup de coeur absolu de notre excursion parisienne.

Allover (Céline Dion, Dvorak, Mozart and Others) 2009,

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Gérard Garouste (1946) est peintre, sculpteur et graveur dans un style figuratif et souvent fantastique. Son travail fait référence aux grands textes que ce soit la bible ou la mythologie grecque, la Divine Comédie ou le Talmud. Sa peinture figurative se dote d’une maîtrise technique extraordinaire. Elle ne cherche pas à plaire, ses déformations bousculent et même rebutent. C’est pourtant une oeuvre qui interroge et pousse à la réflexion. Garouste fait de sa peinture une « cosa mentale » en peignant les diverses interprétations sous-jacentes des textes qu’il choisit et en y semant des énigmes.

L’auteur décrypte ici le triptyque du Banquet: Sur la première on voit un zeppelin qui survole une scène de carnaval à Venise. La deuxième dépeint un banquet bien fréquenté (Scholem, Benjamin, Kafka). La troisième montre des chiens musiciens dansant et volant autour d’un personnage tout feu tout flammes qui ressemble à l’auteur.

A suivre avec l’exposition d’Alice Neel et le prix Marcel Duchamp 2022.

6 réflexions sur “Un réveillon d’expositions à Paris (I): Christian Marclay, Garouste

  1. J’espère pouvoir visiter l’expo de Christian Marclay.
    J’ai vu celle de Garouste les premiers jour de l’exposition, très peu de monde, conditions de visite idéales. Les couleurs, les mouvements, le ‘bruit’ qui semble s’échapper des tableaux, tout ça m’a totalement emballée, interrogée, intriguée.

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  2. Oui, c’est difficile de voir plusieurs expositions le même jour. Garouste était la première pour moi, suivie de Giuseppe Penone que je ne pouvais pas ignorer, puis Alice Neel et enfin le prix Marcel Duchamp dont je n’ai pas vu grand chose, j’étais arrivée au bout de mes capacités.

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