Paul Gauguin (1848-1903) § Le mythe tahitien

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Paul Gauguin, autoportrait, 1893, McNay Art Institute, San Antonio, TX

Paul Gauguin naît à Paris. Son père est journaliste, il meurt lorsque Paul à trois ans. Sa mère est la fille de Flora Tristan, une fameuse militante socialiste et féministe, elle-même fille naturelle d’un noble péruvien. Il passe sa petite enfance à Lima, Pérou, sa famille, étiquetée « rouge » ayant quitté la France pour échapper à la répression. Il rentre en France à l’âge de sept ans et étudie à Paris et à Orléans. A dix-sept ans, il entre dans la marine, puis participe à la guerre de 1870. Un an plus tard, il quitte la marine nationale et devient agent de change à la bourse de Paris. A ce moment, sa vie est confortable et bourgeoise. Marié en 1873 à une danoise, Mette-Sophie Gad, ils ont cinq enfants.

FAMIGLIA-GAUGUINPar le biais du tuteur nommé par sa mère, Gustave Arosa, un amateur d’art, il s’intéresse au mouvement impressionniste et s’essaie à la peinture. Il fait la connaissance de Camille Pissarro qui l’incite à participer, dès 1879, aux expositions des impressionnistes. Il acquiert plusieurs oeuvres : Manet, Cézanne, Renoir, Sisley… En 1882, en pleine crise économique, il abandonne son métier de courtier pour se consacrer à la peinture. Deux ans plus tard, à 36 ans, il passe dix mois à Rouen où habite Pissarro, et peint une quarantaine de tableaux, principalement des paysages.

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Paul Gauguin, « Les carrières du chou à Pontoise », 1882, National Gallery of Canada, Ottawa, Canada

A court de moyens, il part à Copenhague avec femme et enfants, et finit par se résoudre à les y laisser dans sa belle-famille, avec laquelle il ne s’entend guère. 1885, il retourne à Paris pour peindre. Les années suivantes le voient passer un premier séjour en Bretagne et rencontrer Emile Bernard (théoricien du cloisonnisme), puis Vincent Van Gogh. Il forme le projet, avec le peintre Charles Laval, de travailler au percement du canal de Panama, mais finit par passer plutôt plusieurs mois en Martinique où il essaie le métier de planteur et peint une douzaine de tableaux malgré son dénuement et sa mauvaise santé.

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Paul Gauguin, « Végétation tropicale », 1887, Edimbourg National Gallery from Scotland.

En 1889, d’un second séjour à Pont-Aven en Bretagne (où il dit trouver le sauvage, le primitif) et des discussions avec Emile Bernard (et d’autres), naît la théorie du synthétisme (couleurs pures, à plat, cernes noirs, forme simplifiée), entre le cloisonnisme et le symbolisme. Gauguin en reçoit la paternité au grand dam de Bernard qui la revendiquait. Ce qu’on nomme « Ecole de Pont-Aven » était en fait des peintres indépendants qui mettaient en commun leurs idées personnelles et critiquaient vertement l’académisme. Il se détache donc de l’impressionnisme.

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Paul Gauguin, « La Lutte de Jacob avec l’Ange », 1888 Huile sur toile 92 cm x 73 cm© National Gallery of Scotland -Edimbourg

Le tableau ci-dessus, oeuvre manifeste du synthétisme, d’inspiration japonisante, a d’ailleurs fait l’objet de la brouille entre Gauguin et Bernard, celui-ci reprochant la similitude de sa facture avec l’un des siens. Gauguin, lui qui se donne « le droit de tout oser », est le premier à se libérer du naturalisme, à transgresser les règles de la couleur et de la perspective. Il introduit des motifs imaginaires et enfreint ainsi le principe de réalité en usage jusqu’à ce moment.

« Un conseil, ne peignez pas trop d’après nature, l’art est une abstraction… »PG

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Paul Gauguin, « Portrait de Vincent Van Gogh », 1888, musée van Gogh Amsterdam.

L’année 1888 est aussi celle du séjour en Arles avec Van Gogh qui se termine en violente dispute. Entre Gauguin qui glorifie la fantaisie et Van Gogh qui ne jure que par la nature, c’est le lobe de l’oreille de ce dernier qui fera les frais (tranché par qui?) de leur exaltation alcoolisée.

Le premier voyage à Tahiti à lieu entre 1891 et 1893, grâce à une rentrée d’argent: Degas lui achète la toile « La belle Angèle ».

Paul Gauguin entame la rédaction de Noa Noa, dans lequel il raconte ses découvertes de la vie primitive à Tahiti, un enthousiasme mêlé de déconvenue face à ce paradis terrestre idéalisé.

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Il veut se « retremper dans la nature vierge pour y créer un art simple, débarrassé de l’influence de la civilisation ». Il cherche à révéler ce « malgré moi de sauvage »(écrit à sa femme) qui lui permettra de retrouver ses origines profondes, son primitivisme. Il y rencontre la jeune Teha’a-Mana qui devient sa vahiné et son modèle.

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Paul Gauguin, « Arearea »(joyeusetés), 1892. Dans la scène du second plan, inventée, des femmes rendent un culte à une statue. Gauguin a agrandi un petit motif maori à la dimension d’un grand bouddha et il imagine un rite sacré.

Lorsque Gauguin montre cette série de toile tahitienne en 1893, il ne provoque pas l’enthousiasme qu’il espérait. Le ton est sarcastique et on se moque de la couleur du chien et des titres de ses tableaux. Gauguin estime pourtant que cette toile est une de ses meilleures. Déçu de ne pas trouver d’objets d’art primitif authentiques, il sculpte des idoles qu’il invente.

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Paul Gauguin, « Hina and Fatu », 1892, carved tamanu wood, H:32.71 cm, Art Gallery of Ontario, Toronto,

Il passe quelques mois à Pont-Aven en 1894 pour la dernière fois. L’endroit est devenu un phénomène unique en Europe, réunissant des dizaines de peintres.

Il repart pour Papeete en 1895 où il vit durant six ans. Sa nouvelle vahiné se nomme Pahura, elle mettra au monde un fils, Emile. En janvier 1897, à l’annonce de la mort de sa fille Aline au Danemark, Gauguin est désespéré. La détresse matérielle et la solitude le rongent.

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Paul Gauguin, « D’où venons-nous? Où allons-nous? Que sommes-nous? », 1897 (4,50m long.) Museum of Fine Arts, Boston.

C’est à Punaauia, petite ville de la côte ouest de Tahiti, qu’il peint son tableau testament : »D’où venons-nous? Qui sommes-nous? Où allons-nous? « . Sa vision mystique de la vie. Il a l’intention de se tuer après l’avoir terminé. Il crée un journal local: « Le Sourire »: clicker ici

« Je veux aller au centre du mystérieux de la pensée ». PG

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Paul Gauguin, « Les seins aux fleurs rouges », 1899, Metropolitan Museum of Art.

Son usage de la couleur, qu’il qualifie de « …vibration de même que la musique », propose d’entendre, voir et sentir la peinture. Son travail contribuera à l’émergence d’autres mouvements picturaux comme les Nabis, l’expressionnisme ou le fauvisme.

En 1901, il quitte Tahiti pour les Marquises et s’installe dans sa « Maison du jouir ». Il y trouve une nouvelle compagne qui donne naissance à une fille. Gauguin a des démêlés avec le gouvernement et est condamné à une peine de prison. Il meurt d’une crise cardiaque avant de purger sa peine. Il est enterré au cimetière d’Atuona.

Il semble que l’attitude de Gauguin, envers les femmes en particulier, soit fortement controversée par la population locale en Polynésie. Jacques Brel, enterré à ses côtés, est nettement plus populaire dans la région.

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Merci à Janou, en direct de Tahiti, pour ses éclairages.

8025i2Entre 1768 et 1779, la découverte de l’île de Tahiti diffuse une image idéalisée dans l’imaginaire européen. Les philosophes des Lumières, découvrant la description des moeurs des tahitiens, y voient une incarnation de l’utopie de la vie sauvage et de la pureté originelle, les habitants y privilégiant la fraternité et la liberté. Après la colonisation de l’île, l’Etat français encourage cette vision idyllique. En 1889, durant l’exposition universelle, Tahiti est représentée par deux cases et une dizaine d’autochtones. Le livre d’or de l’exposition présente :  » Tahiti, ce pays sans intempérie, où le printemps est éternel, comme l’amour des femmes tahitiennes (…) ». L’écrivain Pierre Loti décrit, dans son roman « Le mariage de Loti »(1880), sa liaison avec une jeune tahitienne et alimente ce fantasme exotique et érotique. Les peintures de Gauguin renforceront encore le mythe de l’Eden paradisiaque de Tahiti .

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L’écrivain péruvien Mario Vargas Llosa, lauréat du prix Nobel de littérature 2010, publie en 2003 un roman qui met en scène les vies parallèles de Flora Tristan (1803-1844) et Paul Gauguin, son petit-fils qui ne l’a jamais rencontrée..

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 Exposition à la fondation Beyeler de Bâle, Suisse.

Avec une cinquantaine d’oeuvres provenant de treize pays, cette exposition montre les toiles les plus connues que l’artiste a produites à Tahiti. Une occasion unique de contempler ces oeuvres.

 

9 réflexions sur “Paul Gauguin (1848-1903) § Le mythe tahitien

  1. J’ai ce livre, « Noa noa » dans une belle édition. J’ai un beau-frère qui vit à Tahiti ( où je ne suis jamais allée ) qui me l’a offert, j’aime beaucoup Gauguin, mais je pense que si c’était un grand peintre, visionnaire, c’était un peu un sale type. En effet, son souvenir dans l’esprit des Tahitiens est plutôt négatif, semble-t-il.J’ai visité le musée de Pont-Aven, très décevant non pas bien sûr pour les toiles, il y a un fond exceptionnel, mais tellement mal exposé, c’en est scandaleux ! ( en plus ce musée est cher ) ; il vaut mieux aller à Quimper, au musée des Beaux-Arts, qui bien que plus classique, respecte les oeuvres en les éclairant correctement. J’ai lu, il y a longtemps « Oviri, la vie d’un sauvage », que j’avais beaucoup aimé.

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  2. Paul Gauguin fut un grand artiste et un grand mytho . Nous ne connaissons de l’hitoire de Van Gogh , qui se voulait pasteur qu’une version où on le voir courant après lui rasoir en main . Même imbibé , celà ne tient pas la route . Après avoir pillé et mis à sa sauce le synthétisme d’Emile Bernard , il pilla l’art des thaitiens revu et corrigé . Qu’il est été pédophile, celà le regarde . Mais ses lamentations perpétuelles sur son manque de fourniture , c’est du pipeau . Tel Michel Ange , il faisait parti de cette race d’artiste qui ont besoin de se plaindre pour créer quelque chose . S’il aimait peindre sur des sac Jutte , c’est uniquement parce qu’ils lui procuraient de la matière qui manquait à sa peinture en a plat cloisonné de très minces cernés bleutés . Comme quoi il ne faut pas croire tout ce que disent les peintres : ce sont de grands  » barratineurs !!! J’espère vous avoir appris quelque chose que l’on ne vous apprendra pas à l’école workiste Bien à vous Daniel Cervera Serrer

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