
BON ANNIVERSAIRE DE L’ART!
(1 million 53 ans)
Voici le génie, l’iconoclaste, l’anarchiste qui a instauré cette journée annuelle depuis 1963. Voici l’artiste sur lequel les détracteurs de l’art contemporain doivent adorer cogner. Voici l’artisan de la pensée, le libérateur du geste créatif, le docteur en innocence, l’architecte des idées, le poète logique, le mystique de la bricole, le simplificateur compliqué, l’anarchiste du style, le virtuose du concept. Voici Robert Filliou.
Né le 999.963 a.a. (après l’art!), en réalité le 17 janvier 1926, Robert Filliou se définissait comme un « génie sans talent », le génie humain étant considéré comme naturel quelle que soit la qualité de sa création. Son travail, au centre duquel se trouvent l’humour, l’imagination et la réflexion, tend à abolir les frontières entre l’art et la vie.
Pièces de théâtre, poésies d’action, performances de rue, happenings, poèmes-objets, envois postaux, livres, écrits, assemblages, multiples, jeux, outils conceptuels, environnements, Centres de Création Permanente, films et vidéos… Il développe de nouvelles formes artistiques.

Prolongeant l’oeuvre de Marcel Duchamp « LHOOQ », l’iconoclaste Filliou propose une version de Mona Lisa (sacrilège?) qui développe son rejet du culte du chef d’oeuvre et de la virtuosité. C’est au nettoyage de l’art qu’il convie le regardeur! Le plus fort, c’est que mentalement, on la voit cette Joconde et on la recrée dans les escaliers!
Il prolonge la maxime dadaïste formulant que « la vie est plus intéressante que l’art » en disant que : « L’art est ce qui rend la vie plus intéressante que l’art. ». Pour lui, l’activité artistique ne peut constituer une carrière professionnelle, c’est une attitude de vie.

A Alès, en 1943, le lycéen Filliou, âgé de 17 ans participe à des actions de résistance. A l’âge de vingt ans, il s’envole pour Los Angeles aux Etats-Unis dans le but de rencontrer son père. Il y reste cinq ans et en revient avec un diplôme d’économie politique (UCLA).
En 1951, fonctionnaire de l’ONU, il voyage au Japon et découvre le Kabuki et la philosophie orientale, le Zen. Il participe à un programme de reconstruction de la Corée du Sud.
Puis, en 1954, il décide d’abandonner cette situation confortable pour le principe d’économie poétique: partage culturel et social, ainsi que non-compétition sont pour lui des valeurs qui comptent plus que leur aspect formel.

Durant quelques années, il voyage. Egypte, Espagne, un fils en 1957, Danemark où il écrit des pièces de théâtre. Il s’installe à Paris en 1959. C’est là qu’il rencontre Daniel Spoerri et s’intègre au mouvement Fluxus (fondé en 1962 par Georges Maciunas, lui-même inspiré par Yoko Ono). Ce mouvement préconise l’humour et la dérision et remet en question la notion d’oeuvre d’art.
L’année suivante, il crée sa première oeuvre plastique : une affiche/pièce de théâtre aléatoire que l’on peut jouer entre amis. Sa première exposition personnelle « Poï poï » a lieu à Copenhague (voir plus bas, 1978).
Il décide, en 1962, de créer sa propre galerie qu’il veut itinérante: l’art doit descendre de ses hauteurs et occuper la rue. La Galerie Légitime est née…de son chapeau, son couvre-chefs d’oeuvres qui présente des objets de petits formats.
De 1965 à 1969, Robert Filliou anime avec Georges Brecht, « La Cédille qui sourit », un atelier-boutique:
« On faisait des jeux, on inventait et „désinventait“ des objets, on était en contact avec les petits et les grands, on buvait et parlait avec les voisins, on produisait des poèmes à suspense et des rébus qu’on vendait par correspondance. On a commencé une anthologie des malentendus et des blagues à partir desquels on a fait des films, avec des scénarios d’une minute… »
En cliquant sur ce lien, écoutez Ben | à propos de la Cédille qui sourit
Il considère que les mots et le langage sont les matériaux de l’artiste et se définit comme artiste-poète. En 1969, il présente le « Principe d’équivalence » ≡ (et non d’égalité =) :

…bricolée de planches de bois, de boîtes en carton et de chaussettes rouges, l’oeuvre postulait « la stricte équivalence du « bien fait »(modèle), du « mal fait »(apprentissage) et du « pas fait »(concept). Refusant de hiérarchiser les œuvres en fonction du talent ou de l’habileté déployés dans leur réalisation, il déclare que sa « spécialité est le mal fait », et élève le « pas fait » au rang de « secret absolu » de la « Création permanente ». Synonyme de « Fête permanente » ou d’« Eternal Network », la « Création permanente » englobe et résume dès lors tout son travail. » Source MAMCO Genève

Il se déclare spécialiste du mal fait et voudrait tendre vers le pas fait, l’inactivité active de la méditation zen.

En 1973 dans une galerie d’Aix-la-Chapelle, il organise le « 1.000.010e anniversaire de la naissance de l’art » : toute la population est conviée et la notion traditionnelle de l’art disparait au profit d’une fête éphémère. Il souhaite « vacances scolaires internationales, congés payés pour les ouvriers du monde entier et festivités spontanées et réjouissances de par le globe »

En 1978, Robert Filliou, invité par le Centre Georges Pompidou, propose alors d’ouvrir avec son co-inventeur, Joachim PFEUFER, un Centre de Création Permanente, le Poïpoïdrome (cliquez pour en savoir plus). Cette action se termine par un échange culturel entre la France et le Mali, une publication et une double vidéo qui relate les expériences menées sur les deux sites.
» L’histoire de l’art chuchotée » de Robert Filliou, dite par Dominique A. Composée au départ de 12 disques de 3 minutes pour juke-box.
Dans les années 80, Robert Filliou, qui trouve que la paix est un art, crée des structures internationales : des traductions bouddhistes zen, l’association The Afro-Asiatic Combine dédiée à la « recherche de l’influence de la pensée contemporaine africaine et asiatique sur la culture occidentale » (1983), une participation artistique à la pacification de la conquête de l’espace avec des étudiants de Hambourg, il s’investit avec sa Sainteté le Dalaï Lama, qu’il rencontre en 1982 avec Joseph Beuys , pour une Biennale Art de la Paix.
Au printemps 1985, Robert et Marianne Filliou partent pour 3 ans, 3 mois, 3 jours en retraite dans un Centre d’études tibétaines. Robert Fillliou décède le 2 décembre 1987. (Dossier Filliou Centre Pompidou )

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Comme Robert Filliou, qui a usé de nombreuses collaborations, qui fondait son art sur la participation, qui a courageusement vécu ses aspirations éthiques et artistiques, Matthieu Ricard, Alexandre Jollien et Christophe André, (présentation des auteurs ) un moine, un philosophe et un psychiatre s’efforcent de vivre en cohérence avec eux-mêmes et publient cet ouvrage utile.
Je ne le connaissais pas. Merci
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A reblogué ceci sur CultURIEUSEet a ajouté:
2020, un million cinquante-septième anniversaire de l’art!
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