« J’étais dans ma maison et j’attendais que la pluie vienne » Jean-Luc Lagarce / Elidan Arzoni

Au Théâtre du Galpon (GE) du 14 au 26 mai 2024

Avec Délia Antonio, Anna Budde, Sophie Lukasik, Nastassja Tanner, Yvette Théraulaz

Elles sont cinq femmes. Engluées dans un temps suspendu qui paraît sans commencement ni fin.

Alignées en léger arc de cercle, chacune sur une  chaise, vêtues de noir, elles parlent de leur attente, de leurs espoirs, de leur rancune aussi. Rongées par une absence, celle du fils, du frère, qui fut chassé par le père.

Mais il a fini par rentrer, celui-là, ce jeune frère. Il est là-haut, presque mort, et on ne le verra pas. Elles l’ont attendu des années, comme si rien d’autre n’était plus important. Ont-elles perdu leur vie à l’attendre juste pour le voir arriver et mourir?

C’est le propos de cette pièce culte de Jean-Luc Lagarce. Dans une mise en scène épurée à l’extrême, plaquée à ce texte en boucles empreint de récurrences et d’amères souvenirs, chacune reste collée à sa chaise. Seul le haut du corps semble en vie. Leurs visages, leurs bras, leurs mains expriment leurs sentiments. Et bien sûr, leurs voix qui disent la dureté de la Mère, la peur de la Plus Vieille, la Plus Jeune un peu à l’écart, l’envie de l’Aînée et la robe rouge de la Seconde. Percluses dans cette immobilité, les cinq comédiennes formulent, racontent, regrettent, souhaitent, impressionnantes d’intensité, de véracité.

Ces femmes endeuillées ressassant le vécu de leur attente, ce choeur de lamentations centré sur l’homme, comment l’interpréter? Injonction ou détermination? Amour ou asservissement? Rancoeur ou chagrin?

Attendant que la pluie vienne irriguer leur coeur asséché à force d’attente, de suppositions, de doutes, elles s’arrachent des bribes d’espérance. Finiront-elles par se lever?

Le visuel final, surprenant et poétique, clôturant la représentation, offre la perspective d’un renouveau et permet l’ouverture. Peut-être…

 

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