Théâtre de Vidy du 12 au 16 novembre 2024
Avec Fhunyue Gao, Mara Miribung, Daniele Pintaudi, Samuel Streiff, Mathias Weibel
Un plateau jonché de déchets calcinés et de verre cassé, une balustrade en piteux état, quelques tables de jardin, quatre personnages avachis sur des chaises, l’un d’eux arborant une tête cadavérique.
Nous voici face à un environnement de prime abord peu réjouissant, et pourtant ce spectacle aussi musical que visuel est délectable à tous niveaux.
Dans ce décor poussiéreux de restaurant, en majeure partie détruit (par un incendie), s’agitent de cinq personnes, vêtues de l’uniforme habituel des serveur.euse.s. A coup de chants choraux, de musiques variées et de sons gutturaux, iels occupent ce lieu-piège, image miroir d’une réalité du passé.

Il y a évidemment des instruments de musiques, mais tout objet inclus dans la narration est potentiellement une source de sonorités: les chaises renversées, les tables où tambourinent les gouttes d’eau, les tessons de verre éparpillés… Une maquette du lieu montre son ancienne magnificence et restaure la nostalgie d’un temps révolu.
C’est lugubrement drôle, aussi surprenant qu’étrangement familier. L’attraction du lieu, sa cascade, ne rugit plus que pour déverser de la cendre. Lorsque l’un s’adresse au public, ses phrases sibyllines ou ordinaires sonnent comme des sentences narquoises: « Il y a toujours de l’espoir pour demain…ou sinon pour hier! ».Bien qu’émaillée de lieds romantiques, voix d’outre-tombe et grondements fracassants contribuent à créer une ambiance post apocalyptique.
Le modèle réduit du lieu se transforme alors en caverne de Platon et dévoile les ombres chinoises du passé, foule de plus en plus pressée, pour convier ensuite le présent et ses incarnations à investir un éventuel futur à reconstruire. Après l’effondrement, le temps d’une solidarité humaine?
Magistral, poétique, intelligent, virtuose… peu de mots pour décrire ce spectacle saisissant.


