« Smoke » Philippe Saire

Théâtre Sévelin 36, du 11 au 22 septembre

Interprète: David Zagari

Premier spectacle de cette saison théâtrale 2024-2025! Un spectacle court et très visuel, même si je ne peux m’empêcher d’y inscrire mon propre récit mental.

Deux parois obliques dégagent un espace restreint, triangulaire. A l’arrière, des lumières multicolores clignotent. Le son est inquiétant, des cris de foule, le crescendo d’un appareil motorisé. Un parc d’attraction, une foule d’agoraphobes ou une catastrophe brutale?

Un être apparaît peu à peu, se hissant au-dessus de ce mur noir. Deux grosses pattes, suivie d’un corps ouaté. C’est un lapin, un lapin blanc. Qui m’évoque immédiatement le conte de Lewis Caroll. Le temps pourrait-il être un thème de ce septième Dispositif *de Philippe Saire?

Emprisonné dans cet espace, non sans difficulté, il se débarrasse de son costume et découvre le public. S’engage alors une danse athlétique où le personnage tente sans succès de trouver une issue, d’échapper à ce qui pourrait être une chausse-trappe, un piège. Son corps prend les commandes et le dirige implacablement.

Photo Philippe Weissbrodt

Une fumée apparait sur une des cloisons. Elle semble liquide et coule en cascade, pourtant elle ne se répand pas et s’engouffre sous la façade. A d’autres moments elle devient filaments, évoque une chevelure. Le personnage la touche, il y met ses mains, sa tête. La fumée change de sens, monte vers la lumière. Au ralenti, l’harmonie d’une danse lente et homogène s’installe.

Il se débarrasse du costume, remet la tête de lapin et s’adresse au public, tentant de communiquer par un langage de signes, une danse muette et gestuelle, un discours du coeur.

La fumée dégoulinante envahit le sol, s’étale en masse épaisse. Ôtant alors cette tête factice, il disparaît dans ce nuage.

On peut déguster l’esthétique de cette pièce dansée sans s’interroger et se laisser aller aux volutes hypnotiques de ce travail sur la fumée (Antoine Friderici). On peut aussi en apprécier la chorégraphie et la fluidité du danseur (David Zagari). On peut également s’y introduire par son espace sonore (Stéphane Vecchione). Et j’ai aimé y inscrire librement ma propre narration.

*Les Dispositifs sont des courtes pièces où le chorégraphe suisse Philippe Saire explore des formes visuelles inédites et puissantes.

Photo Philippe Weissbrodt

Propos de Philippe Saire (leprogramme.ch) :

(…) Cela (le parc d’attraction, le divertissement) raconte beaucoup de notre condition humaine et notre besoin épisodique d’oubli. L’espace scénique est conçu en entonnoir est semblable à un espace mental. Le personnage travaille comme employé dans un parc d’attraction. D’où le déguisement du lapin. Trouvant cette situation insupportable, il cherche alors à s’émanciper de son état.

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