
Comme les romantiques d’hier, les candidats au suicide assisté trouvent en Suisse de confortables chambres dans des palaces avec des vues sur des paysages splendides, idéaux et doux, devant lesquels le grandiose serein annonce la mort. Note d’intention du spectacle

43. « En vous souhaitant un agréable séjour au Grand-Hôtel, où tout ne sera que luxe et calme, Monsieur! »
La Suisse et ses palaces… une idée persistante du confort à la Nabokov qui, ainsi que d’autres riches résidents, s’y est installé jusqu’à sa mort. Mathieu Bertholet évoque ces lieux propices au lâcher-prise, où l’arrivant est assisté dans ses moindres gestes, où l’on prévient tout désagrément. Il imagine leur réutilisation par le tourisme du suicide assisté, où le dernier souffle serait analogue à un soupir de stupéfaction admirative devant la vue majestueuse des Alpes émergeant d’un lac étale et céruléen.

Le rendu scénographique de l’hôtel est bluffant: trois plate-formes divisées par un escalier et les chambres de part et d’autre. L’accueil des hôtes et leur installation comprend un rituel immuable et sécurisant. Ceux-ci, invariablement issus de la bourgeoisie cossue, arborent des tenues qui témoignent de leur époque, entre XIXe et XXIe siècle.
Pour le spectacle, il s’agit donc de jouer sur l’incertitude de ce que sont devenus ces lieux. Les espaces d’un luxe élégant ou d’une tout autre sorte de confort, dans lesquels un majordome est peut-être finalement un infirmier. Mathieu Bertholet
C’est une véritable chorégraphie que les comédiens déploient dans ce somptueux décor. Tout en déclamant quelques-uns des 229 fragments du texte de Mathieu Bertholet (ceux qu’ils ont la liberté de choisir sur le moment), ils investissent avec une régularité métronomique ce cocon inaltérable et fastueux. Pour leurs derniers instants, luxe, calme et volonté … de s’éteindre avec une certaine volupté.

Spectacle contemplatif, esthétique millimétrée, la « Mélodie du bonheur » en bande son, « Luxe, calme » est une évocation raffinée de la mort délibérément choisie qui, on s’en doute, relève d’une imagerie idéale. Comme le dit l’auteur: « une atmosphère belle et douce, mais ambivalente sur sa fonction et sa destinée ».

En Suisse, il existe cinq associations agissant pour le suicide assisté, les plus connues étant EXIT et DIGNITAS.
Si ces associations n’accueillent pas les candidats au geste ultime dans les palaces du pays, elles ne sont pas pour autant réservées aux élites richissimes. Les accompagnants bénévoles le font par conviction humanitaire. Pour lire (Tribune de Genève) le témoignage d’une accompagnatrice, cliquer ici et pour visionner le film documentaire du cinéaste suisse Fernand Melgar sur le fonctionnement d’EXIT, cliquer ici.

EXIT est un service gratuit pour les membres suisses adhérents depuis au moins une année. Une cotisation annuelle de 40.- CHF est perçue. En fonction depuis 1982, le nombre de ses adhérents approche, au moment de cette chronique, des 27000 membres qui n’utiliseront pas forcément ses services. Son principe est de lutter contre l’acharnement thérapeutique, de faire reconnaître les droits du patient en demandant le respect de sa volonté et de son choix face à sa propre mort.
DIGNITAS, fondée en 1998, estime que le suicide constitue l’ultime liberté de l’être humain. Elle demande une taxe unique d’adhésion de 200 CHF, ainsi qu’une cotisation annuelle libre mais d’au moins 80 CHF. Elle s’adresse aux citoyens de tous pays, considérant qu’il est inadmissible de faire la distinction entre ressortissants du pays et étrangers, dès lors qu’il s’agit de personnes qui subissent des souffrances atroces.

Un article du quotidien suisse Le Temps sur une femme de 76 ans qui a décidé de quitter ce monde en santé en 2020 : https://www.letemps.ch/societe/mourir-belle-lan-prochain.
Merci ! Aussi pour ces tableaux de Hodler – si loin de ces œuvres « historiques » … parfaitement choisi pour souligner tes propos !
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Je me réjouis d’une exposition qui va avoir lieu près de chez moi, à Pully!
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Veinarde. …
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Merciiiiii ! Merci d’aborder avec autant de sensibilité ce sujet tabou en France.
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