Pour initier ce spectacle, Massimo Furlan (conception) et Claire de Ribaupierre (dramaturgie), ainsi que Kristof Hiriart (chants), ont travaillé sur le long terme avec tout un village, celui de La Bastide-Clairence (Pays basque, France).
En 2014, Massimo Furlan y est invité en résidence. Partant de la crainte des habitants de voir l’avenir de leur attrayant village menacé par l’augmentation du prix immobilier et de ce fait d’assister au départ de leur jeunesse, les auteurs entreprennent leur projet sur l’idée de dissuader les achats prohibitifs par l’accueil prétendu de réfugiés dans la commune. Ils interprètent leur scénario lors de réunions dans le but d’engager une réflexion avec les citoyens. Une fiction que la réalité dépasse en 2015 avec l’afflux migratoire en Europe de réfugiés syriens et l’empathie qu’il provoque. L’ancien maire propose une action concrète autour de l’accueil et de l’hospitalité, enrichie des interventions de sociologues, écrivains, travailleurs sociaux, etc. Les échanges ont lieu autour d’expériences concrètes menées à Calais et Bayonne. Depuis lors, des villageois se sont déclarés intéressés, le collectif se réunit une fois par semaine et une première famille syrienne est accueillie.
Ce village d’un millier d’habitants est représenté sur scène par huit de ses habitants et Massimo Furlan lui-même. Sur scène, ce sont leurs expériences personnelles, leurs peurs et leurs désirs, que les comédiens racontent et c’est en ceci que la pièce est passionnante et artistique. Les récits s’entremêlent et le public fait connaissance avec les individualités. Une potière explique sa démarche artisanale et nous y voyons l’analogie d’un équilibre à atteindre, d’un objet qui prend forme. Une professeure de fandango (danse traditionnelle basque), raconte son parcours et invite au partage et à la cohésion des corps pour une chorégraphie. Une femme âgée décrit les contraintes, se révélant bénéfiques ou non, qui ont été les siennes durant son existence. Les maires, l’ancien et le nouveau partagent leurs expériences. Une jeune femme relate la douleur de la perte, la souffrance issue de la différence. Une autre se souvient de son enfance et des passages clandestins de réfugiés portugais fuyant la dictature Salazar.
Filmée par Jérémie Cuvillier, cinéaste, la région est présente par l’image.
Ce spectacle, aussi émouvant dans son objectif que par sa réalisation, invite le spectateur de façon subtile à réfléchir au geste même qu’implique l’hospitalité. Les sujets de l’identité, de l’accueil, du rapport à l’autre, sont abordés par le biais des anecdotes et des récits personnels avec pudeur, délicatesse et humour. Entrecoupés de chants et danses tout aussi symboliques, c’est un plaisir intense que d’assister à ce travail théâtral d’un aspect modeste et d’une profondeur considérable.
L’hôte accueille parce qu’il a conscience qu’un jour ce sera peut-être lui l’étranger, lui qui demandera l’hospitalité. C’est donc un système de don / contre-don qui est initié. Et en échange qu’offre celui qui est accueilli? Il engage un récit qui répond aux questions : Qui es-tu? D’où viens-tu? Qui sont tes parents? Comment est le monde d’où tu viens? Claire de Ribaupierre
Pour accéder à la page du théâtre de Vidy, Lausanne, consacrée à ce spectacle, c’est ICI
La tradition de l’hospitalité remonte à l’Antiquité. Ulysse y a recours à maintes reprises dans l’Odyssée. L’individu n’étant que peu protégé par les lois, l’hospitalité était un devoir fondamental et sacré.
ton texte (la pièce) font (ré-)sonner douloureusement les mots entendus toutàleurre de la bouche de Bruno Lemaire (Fillon) : « La France n’est pas en mesure d’accueillir plus de réfugiés ! »
J’aimeJ’aime
Démarche intéressante pour peser le pour et le contre ! J’ai visité votre village il y a quelques années et j’ai beaucoup aimé. Joli souvenir d’une fin d’été 🙂
J’aimeJ’aime
Si vous parler de ce village basque, ce n’est pas le mien, mais merci pour le commentaire!
J’aimeAimé par 1 personne