
Du nom du premier journal satyrique de langue arabe (Abou Naddara: père lunettes), ce collectif de jeunes cinéastes syriens, fondé en 2010, met en ligne sur internet et sur Facebook chaque vendredi un court métrage d’une durée d’une à cinq minutes. les réalisateurs travaillent dans l’anonymat pour des conditions de sécurité, malgré des difficultés de tournage extrêmes. De plus, jusqu’à maintenant et malgré les demandes de subventions, le collectif ne bénéficie d’aucun soutien financier.
Sélectionné dans nombre de festivals, une des trois mentions spéciales du jury de la 56e Biennale de Venise (2015) leur a été assignée. Le pavillon syrien a été entièrement aménagé par des non-syriens. Les oeuvres syriennes ont été choisies par Emad Kashout.
Cette production veut démontrer que pendant que la politique et l’histoire divisent, l’art, lui, rassemble.
Ces courts métrages, réalité ou fiction, relèvent d’une démarche artistique autant que d’une participation à la révolution syrienne. Charif Kiwan, le porte-parole du collectif, parle ici de leur démarche, destinée à réhabiliter l’image du peuple syrien:
« …nous l’exprimons avec les outils du cinéma qui est un art de la représentation. Nous faisons des choix de narration, de cadrage ou de montage qui permettent d’introduire une certaine distance avec l’actualité. Nous nous adressons au spectateur en tant qu’individu universel et non pas en tant que citoyen concerné par cette actualité. Et nous lui demandons de juger chaque film en tant que tel, c’est-à-dire en tant qu’œuvre de création artistique exprimant le savoir-faire et l’éthique de son auteur. »
Voir ICI le travail du collectif sur Vimeo
« Notre travail s’inscrit dans la tradition du cinéma documentaire d’auteur, mais nous jouons volontiers des codes de la fiction, du clip, du ciné-tract ou du dessin animé. »
مصرّون Just Do It from abou naddara on Vimeo.
« Les artistes doivent mettre leur art au service de la société qui les a formés, au même titre que les médecins qui soignent dans les hôpitaux d’urgence. Car l’art peut soulager les souffrances de ceux qui vivent avec la mort aux trousses. »
Ces films en appellent à l’humanité de chacun, à la conscience individuelle, hors de toute autre considération. Ils sont une réponse artistique et humaine au déversement d’images, souvent insoutenables, sur le conflit syrien. Le régime syrien ayant monopolisé la production cinématographique et télévisuelle, ces créations représentent aussi une mouvance artistique indépendante.
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Que faire de notre compassion et notre tristesse occidentale devant ce conflit majeur? Nous sommes tous confrontés aux actualités effroyables des différents conflits mondiaux. Nous en éprouvons de l’empathie. La compassion qui en résulte est une attitude (et non une émotion) qui nous porte à être sensible à la souffrance d’autrui.
Selon le Dalaï Lama, la compassion peut se décliner en trois niveaux : le premier consiste en la capacité de voir l’autre comme un autre soi, le deuxième dans la capacité de s’échanger avec autrui pour mieux comprendre la réalité de ses souffrances, notamment par le processus de la visualisation. La troisième consiste à considérer l’autre comme plus important que soi, aboutissant à la Grande compassion qui consiste en toute situation à prendre la perte pour soi et à offrir le gain à autrui. (source wikipedia)

Mathieu Ricard est docteur en génétique cellulaire, moine bouddhiste tibétain, photographe et auteur. Il devient l’interprète français du Dalaï Lama en 1989. Il a traduit de nombreux ouvrages, dont « Au coeur de la compassion » de Dilgo Khyentsé Rinpoché:
Mathieu Ricard consacre l’intégralité de ses droits d’auteur à 130 projets humanitaires. Il fait partie du Mind and Life Institute qui facilite les rencontres entre sciences et bouddhisme et participe activement à des recherches sur la plasticité du cerveau aux Etats-Unis et en Allemagne. Il est aussi engagé pour la protection de la nature et des animaux.
S’engager est une chose, partager un peu en est une autre. Très simple et selon ses possibilités.

Bel article, touchant, quel courage, et quelle opiniâtreté…C’est tellement triste
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Les quelques films que j’ai vu sont magnifiques et suggèrent la vie malgré tout.
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Le pouvoir des mots et celui des images contre celui de la terreur. De tout coeur avec eux. Merci pour cet article très émouvant 🙂
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Il semble quelquefois si faible au regard des victimes et des atrocités, c’est pourtant une trace indélébile de l’humanité du monde.
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Les traces, ajoutées les unes aux autres, finissent par former un chemin ?
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